… Préambule
Les automnales (entre-musique) sont le souffle avant coureur du livret intitulé Livre des ravages, et se trouve dans la chute même de Musique atonale.
Liées sans l’être vraiment, ces petites suites dessinent à leurs manières les brins d’un même fil, comme il arrive dans la vie que certains mouvements en appellent d’autres, ou que d’un geste découle toute une série d’imprévus. Y avait-il un certain emballement ? Je ne saurais répondre. Je me souviens néanmoins que l’allant était sûr, marqué d’une sorte d’inévitable. Il me fallait avancer, et résolument, entrer dans «la forêt» comme revenir au vivant réel (Musique atonale), jusqu’à rencontrer sa nature et celle qui est tue, des branches de mémoires qui se dénudent laissant apercevoir les aspects qui y «habitent» (Les automnales), puis jusqu’à se perdre presque tout en retrouvant le chemin «de la maison» (Livre des ravages). La maison représente la créativité, le moment jaillissant du geste vivant – le souffle véritablement respiré autant que l’élan créatif -, l’expression exprimée – sortie de – du même souffle, tournant et retournant (les textes ou les vers, mais aussi comme je le fais quand je peins, tournant et retournant le papier, travaillant l’image à l’endroit et à l’envers), générant sans cesse d’autres images et autant de façons de voir le monde, de vibrer le monde ; autant de façons de mourir à lui (et à soi), et de reprendre vie à lui (et à soi), transfigurant ainsi le mouvement de mort – l’expiration – et le mouvement de vie – l’aspiration-, et les inversant tout-à-fait : l’expiration devenant une forme vivante d’expression quand l’inspiration (le garder pour soi, le taire, le retenu) est une forme de mort.
Voici donc rassemblés et dans l’ordre Les automnales (entre-musique), second fil de cette corde d’écriture, que la parenthèse situe entre deux mondes, entre deux résonances distinctes, faisant un pont, ou figure de poignet, entre la mort et la vie, la forêt que [je] porte en lui et la forêt exprimée dans le monde-forêt.
______________________________________________________________
Les automnales (entre-musique)
est-il encore
ce refuge
large balancement de cimes entrelacs
frondaisons
et l’appel des écorces ce qu’un métal démembre bientôt le lièvre sera blanc
ou mort j’attends le ravage des cerfs * recommence
ta forêt recommence d’abord tu planteras son espace
comme mille fois le corps de ton corps d’espace
plante ton regard
il faut penser que les heures ne poussent
ni ne sonnent encore
et qu’elles ne sont que ces grappes
qui contraignent plus le fruit que le ciel * signe avec ta bouche dans l’espacement d’ouvrir tous les bras de mer
les mains pleines de sang et de miel
les yeux plongent
ce prolongement de gestes que tu sèmes comme mille fois l’espace dans le corps de ton corps
et le rêve que tu n’as pas encore fait
tous les corps d’arbres et de naufrages s’accordent
aux mouvements de glisse où d’espacement en espace de corps
tu ouvres leurs sols cachés et entre eux
parlent pour que tu assois l’idée et la remettes sous le soc des plantées longues de pierres comme des maisons du quartz en ruisseaux colorés
juste au milieu de tes poitrines
où tu caches
des mains d’enfances où il n’y avait jamais assez
d’heures à jouer
de confiture pour ton sourire * signe avec tes yeux les paumes vertes ce mouvement
se rouvre et referme le mal dans l’escarre
mais surtout les yeux passent au travers
comme d’une saignée hagarde en robe à fleurs
transparente dans la mer d’arbres ne pense pas l’heure ou l’autre ni rien
non rien que le mouvement que tu commences vif
à recommencer ta forêt recommence signe ta forêt
recommence
signe avec tes lèvres * ajouré pareillement l’anse un poignet de lente lumière à s’ouvrir tendre une veine où rien ne fuit ni d’ombre ce silence dont nul ne revient sans revenir l’entrée de la source d’âme l’arbre autrefois il y avait ces décombres tu en parles toujours humide des bris chaque minute tu embrassais la cité son métal et la mort t’attend encore ramages futaies mauves entre tes grands bois moirés des sèves et des ors dans parfaitement parfaire l’élan des écorces jusqu’à s’enlacer vers et cette transparence * des sons ruissellent sous les fagots d’enfances nous préparons des feux chaque branche promet l’embrassement * longe une sente étroite et haute entre chaque heure sur ta peau les épines lisent le futur * comme les minutes griffent ta poitrine leurs minuscules dents attisent mon désir * assise dans l’écorce l’humide parfum des rousseurs me fume la buée j’aspire je ne peux qu’aspirer * un méandre de fusain la brume déchire les glissements chuintent bronzes et cuivres doux dentelures dont le sol crépite invisible * des échos le métal très loin un miroitement de verre un peu plus de silence dessine ta main sur un chêne te semble irréelle la part de toi qui court et hurle la pente abrupte la montagne regarde tes yeux de loup .___________________________________________________________________________________ note aux yeux passants : certains passages ont été modifiés aussi bien sur les pages anciennes (2009-année de ces trois suites) des Trajectoires vers l’incertain, que dans cette présentation, pour la raison qu’un projet d’écriture était en réalisation pour l’année 2012, projet achevé et publié depuis.
mise en page défaite volontairement – mise en attente.
J’aimeJ’aime