• encre de passage

 

 

 
20140713-211535-76535941.jpg©catrinegodin2014/ encre sur papier mouillé
 

 

 
je cultive un jardin de malaises et des plate-bandes d’inclartés où poussent pêle-mêle des petites baies de grisailles. un soleil occulté y désoriente chaque jour, selon ses bruines d’entre-saisons, ses inconstances. les fleurs d’inconforts s’auréolent de questions tendues en bouquets, tandis que des buissons flous élaborent, cuisante, la corrosion des maillons faibles des chaînes, ces vouloirs savants et devises étrangères en pourtour.

dans mon jardin de camaïeux et de brume est une petite table mise — je garde pour moi les chaises d’infortunes — et pour l’ami ou l’esprit patient est l’invite à s’asseoir, à ouvrir un moment quelque flacon de minutes, à faire couler dans sa tasse de thé ce temps fluide et une goutte d’élucidation infusée, puis encore quelques grains de cette musique entendue à demi et lointaine qui rappelle légèrement…?

ensuite ensuite, l’ami souvent sans mot s’en va de mon jardin ivre avec une cuiller d’un miel étrange et mauve, fait de ce butin récoltés, rêveries aux pistils démesurés, et d’un peu de sève d’arbrisseaux foisonnant : cette eau délicate des louanges d’oiseaux et d’intempérances — ha! si la promesse des parfums et l’infusion pouvaient tout révéler. ailleurs ensuite peut-être qu’aux détours de promenades et à pas lents — dans dix ans ou cent ans peut-être — apparaîtraient soudainement à l’esprit patient des couleurs et des teintes d’imprécisions choisies. alors les sens mitigés feraient par eux-mêmes toute la clarté.

 

 

 

promenade /1

20140713-180434-65074686.jpg©catrinegodin2014 /encre sur papier mouillé
 

 

 

tu penses des incendies
des carcasses calcinées
le charbon de bois

on m’a enseigné le feu

comme le brouillard

 

 

 

promenade /2

20140713-175130-64290713.jpg©catrinegodin2014 /encre sur papier mouillé
 

 

 

dans une mer de bras et de jambes
la vie est un filet tendu
au-dessus duquel marcher sa disparition

la parole n’a pas d’équilibre
qu’elle vole ou plane
nous la glissons dans l’oreille de la mort
pour la faire patienter

nous savons comme la mort nous chérit

 

 

 

promenade /3

20140713-032034-12034168.jpg©catrinegodin2014 /encre sur papier mouillé
 

 

 

je suis un cimetière
une plantée de pins où
dorment les fourrures
abandonnées sans sépulture

une terre boit des corps ainsi
efface ses continents
brise longuement ses échines

 

 

 

 

 

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concept :
la poésie comme installation, une pièce avec en continu le premier texte relu en superposition avec projections secouées de soubresauts et d’images multipliées, les unes sur les autres, pour un brouhaha auditif et visuel, progressif puis insistant, puis trois chambres noires où figure dans chacune une toile luminescente sur un mur complet et le simple texte d’accompagnement projeté au sol dans un mouvement de balayage très lent, avec en fond sonore du Bley delayé, très sourd, une pièce de Satie en boucle, et, un bruitage de mécanique, des cliquetis de métal, des bruits de pas qui vont et viennent puis s’évanouissent.
 

 

 

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5 commentaires pour • encre de passage

  1. 4ine dit :

    explication :
    le premier texte est une croûte, un « barbouillage » de mots et de signes qui peut peut-être se référer à l’image => https://trajectoiresverslincertain.files.wordpress.com/2012/03/dscf1069.jpg?w=900 (par exemple) en tant que discours pictural, qui était une ébauche du travail que j’avais amorcé comme étant une « approche rorschach » du tableau (2004) ; la première encre est une écriture de signes sans mots, de griffes et de taches, dans la même optique mais 10 ans plus tard, en pleine élucidation/compréhension autant du point de vue de l’approche que du discours. l’un et l’autre brouillant la lecture de l’un comme de l’autre, la perte de sens ici générée par le conflit texte-image est volontaire voire recherchée, le confus et l’ennui sont consciemment produits pour qu’ensuite les promenades puissent officier dans le regard une sorte de lavage, une liberté, une respiration.. dans les sens, la pensée et la parole …les promenades sont chacune des résolutions (abstraites voire détachées) des paragraphes du premier texte/croûte.

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  2. 4ine dit :

    (ceci dit avec humour)

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  3. rechab dit :

    Belles « choses poétiques » ou s’accompagne le rythme de ce que vous rendez visible, aussi.

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  4. 4ine dit :

    merci beaucoup, merci pour votre générosité.

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  5. rechab dit :

    Vous savez ( tu sais) – quand il y a des textes qui touchent, j’ai envie d’y répondre … et plutôt que le faire par j’♥ ou l’équivalent…
    — je mets qq chose de + personnel,
    voire un texte que ça me rappelle,—- ou que je fais « sur place » … comme ma « révolte minérale »…par rapport à ce qu’a écrit Claire Ceira ….

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